Drogue et alcool au travail : Des effets ravageurs sur la performance et la sécurité au travail

L’usage de substances psychoactives – qu’il s’agisse d’alcool, de tabac ou de cannabis – ne relève pas seulement de la sphère privée. Il a des conséquences directes sur le maintien dans l’emploi et sur la sécurité au travail.

Plusieurs études convergent : ces consommations fragilisent l’insertion professionnelle, favorisent les arrêts de travail et accroissent le risque d’accidents, parfois graves.

Chez les actifs, la consommation régulière accroît de façon significative le risque de perdre son emploi à court terme, indépendamment de l’âge, du sexe ou de l’état de santé. Les jeunes sont particulièrement vulnérables : l’usage hebdomadaire de cannabis ou une consommation d’alcool jugée « à risque » réduit leurs chances d’accéder à un premier poste. Une porte d’entrée vers l’exclusion professionnelle qui ne doit pas être sous-estimée.
Pour ceux déjà en activité, les effets se traduisent rapidement en absentéisme. Le cannabis est associé à une hausse de près de 60 % des arrêts de courte durée (jusqu’à une semaine) et d’environ 30 % pour les arrêts de durée moyenne (8 à 28 jours). Quant à l’alcool, ses effets sont encore plus préoccupants : une consommation hebdomadaire excessive multiplie par deux le risque d’accidents du travail graves. Ce risque grimpe encore – + 50 % – pour ceux qui connaissent un épisode d’alcoolisation ponctuelle importante au moins une fois par semaine.

Au-delà des enjeux de santé publique, ces données rappellent que prévenir et accompagner les usages de substances psychoactives relève donc autant de la responsabilité sociale de l’employeur que de la préservation du capital humain et de la performance collective.

Retrouvez cet article dans le numéro 462 de la revue d’information et d’analyse PREVENSCOPE : «La Prévention des Risques en Entreprise »

Attestation d’absence de contre-indications médicale

Attestation d’absence de contre-indications médicale à la conduite d’équipements de travail nécessitant une autorisation de conduite : le modèle a été publié

Cette attestation remplace depuis le 1er octobre 2025 le suivi individuel renforcé obligatoire pour les personnes occupant certains postes de travail.

Elle doit être remise après un examen par le médecin du travail, puis transmise à l’employeur. Son modèle, délivré par le médecin du travail, a été publié au Journal officiel du 30 septembre dernier. Nous vous le transmettons ci-après :

Liste des engins concernés :

  • grues à tour ;
  • grues mobiles ;
  • grues auxiliaires de chargement ;
  • chariots automoteurs de manutention à conducteur porté ;
  • plateformes élévatrices mobiles de personnes ;
  • les engins de chantier télécommandés ou à conducteur porté(à l’exclusion des tracteurs agricoles et forestiers pour le régime agricole).

Un autre arrêté pris le 26 septembre 2025 est venu quant à lui abroger l’arrêté du 2 décembre 1998, relatif à la formation et à la conduite des équipements de travail mobiles automoteurs et des appareils de levage de charges ou de personnes. Il intègre la nouvelle attestation au dispositif d’évaluation du travailleur à qui le chef d’établissement délivre une autorisation de conduite.
Cette évaluation atteste que le travailleur dispose de la capacité à conduire en sécurité l’équipement pour lequel l’autorisation est envisagée.

Elle prend désormais en compte les trois éléments suivants :

  1. La détention et la présentation par le travailleur d’une attestation conforme au modèle ci-dessus, en cours de validité, qu’il ne présente pas de contre-indications médicales à la conduite du ou des équipements dont la conduite est visée par l’article R.4323-56 du Code du travail ;
  2. Un contrôle des connaissances et du savoir-faire de l’opérateur pour la conduite en sécurité de l’équipement de travail ;
  3. Une connaissance des lieux et des instructions à respecter sur le ou les sites d’utilisation.

S’agissant plus spécialement des équipements de travail mobiles automoteurs et des équipements de travail servant au levage, cet arrêté définit le périmètre de la formation que doivent recevoir les personnes les conduisant.

Complétée et réactualisée chaque fois que nécessaire, elle a pour objectif de donner au conducteur les connaissances et le savoir-faire nécessaires à la conduite en sécurité. L’employeur doit également fournir au conducteur les consignes de sécurité relatives au matériel utilisé.
Elle peut être dispensée au sein de l’établissement ou assurée par un organisme de formation spécialisé, sa durée et son contenu devant être adaptés au type d’équipements de travail concerné.

Hervé Brizay – Juriste TUTOR – Groupe Pôle Prévention

Retrouvez cet article dans FOCUS d’octobre 2025, le  bulletin mensuel de veille et d’analyse juridique du Groupe Pôle Prévention.

Transition numérique – Il faut faire rimer IA et conditions de travail

« 66 % des salariés de PME déclarent que leur entreprise les incite à suivre une formation à l’IA contre seulement 25 % des employés de grandes entreprises »

Une récente étude OpinionWay pour Cegid met en lumière la relation ambivalente des employés de bureau français à l’intelligence artificielle. En effet, si l’IA s’impose désormais dans la plupart des bureaux européens, la France se distingue à la fois par une adoption plus prudente et par un engagement notable de ses PME, en avance sur bien des grandes entreprises.

Les salariés français réservés face à l’IA

Selon l’enquête, 58 % des salariés de bureau en France déclarent avoir déjà utilisé une IA dans leur travail, contre 73 % en Espagne et 66 % en Allemagne. Près d’un quart des salariés français (23 %) s’en désintéresse totalement, proportion deux fois supérieure à celle observée au Portugal.
Ce moindre usage s’accompagne d’un rapport plus méfiant : 31 % évoquent d’abord de l’inquiétude et seuls 44 % de la curiosité, quand la confiance et l’enthousiasme dominent chez leurs voisins. Cette prudence, souligne le rapport, traduit une « méfiance culturelle» plus ancrée en France qu’ailleurs.

Les PME françaises en avance

En revanche, alors que dans les autres pays européens, le déploiement de l’IA reste très corrélé à la taille des structures, les PME françaises se montrent particulièrement dynamiques. 73 % des salariés de PME affirment que leur entreprise les encourage à utiliser l’IA alors que ce n’est, par exemple, le cas que pour 32 % des salariés du secteur public. Leur mobilisation dépasse même celle des grandes entreprises nationales. De même, 66 % des salariés de PME déclarent que leur entreprise les incite à suivre une formation à l’IA contre seulement 25 % des employés de grandes entreprises. Ces données contredisent donc l’idée reçue selon laquelle seules les grandes structures auraient les moyens d’adopter ces technologies.

Répondre au “stress technologique”

Si les PME progressent, le rapport souligne toutefois la persistance d’un pessimisme marqué. Un salarié français sur deux estime que l’IA rendra certains métiers obsolètes, et 38 % craignent une déshumanisation du travail. L’enjeu est donc d’accompagner cette transition pour éviter qu’elle ne devienne source d’anxiété. Cela suppose d’associer les salariés aux choix technologiques, de montrer les bénéfices concrets de l’IA en matière de réduction de la pénibilité, de prévention des risques ou de gestion de la charge mentale, tout en maîtrisant les nouveaux risques liés à son usage : dépendance, perte de sens, surcharge cognitive, etc.
Selon l’étude de la Cegid, l’adoption de l’IA par les salariés dépendra pour une large part de la capacité des entreprises à faire en sorte que cette révolution technologique renforce leur bien-être professionnel.

(1) “L’adoption de l’intelligence artificielle par les salariés de bureau, consultable sur
www.opinion-way.com/fr

Corée du Sud : l’IA mobilisée pour sécuriser les petits et moyens chantiers

« Le système permet l’identification précoce des facteurs de risque et facilite des interventions rapides pour prévenir les accidents »

« Le gouvernement métropolitain de Séoul a mis en place, dès 2021, un système intelligent de gestion de la sécurité pour améliorer la SST sur les petits et moyens chantiers. Cette initiative utilise l’IA, des capteurs « internet des objets » et la surveillance en temps réel pour détecter des dangers potentiels comme des risques structurels ou le non-respect des protocoles de sécurité par les travailleurs, et pour envoyer des alertes immédiates aux superviseurs. Le système permet l’identification précoce des facteurs de risque et facilite des interventions rapides pour prévenir les accidents, en particulier dans les environnements à haut risque. Il intègre aussi des données pour l’analyse des tendances, contribuant ainsi à améliorer la planification de la sécurité à long terme. En s’appuyant sur ces technologies, la ville entend également réduire les accidents et améliorer la supervision de la sécurité, en particulier sur les sites faisant généralement l’objet d’une moindre attention sur le plan réglementaire. »

Rapport “Révolutionner la santé et la sécurité : le rôle de l’IA et de la numérisation au travail, Organisation internationale du travail, 2025

Intelligence artificielle et conditions de travail – Levier de progrès et facteur de risques

Nul ne peut encore l’ignorer : la numérisation et l’intelligence artificielle sont en train de modifier en profondeur la façon dont nous travaillons, dans tous les secteurs. Et comme les précédentes révolutions technologiques, celle-ci va bien entendu avoir de profondes conséquences sur les conditions de travail.


L’Organisation internationale du Travail (OIT) a récemment consacré un rapport à l’évaluation de l’impact de la numérisation et de l’intelligence artificielle (IA) sur la santé et la sécurité au travail. Selon les auteurs, les technologies numériques – capteurs, robotique, plateformes, réalité virtuelle ou gestion algorithmique – peuvent sauver des vies et améliorer les conditions de travail. Mais ils comportent aussi de nouveaux risques auxquels les entreprises, doivent se préparer, y compris les TPE et PME.

Des promesses concrètes pour la prévention

À rebours de tout techno-pessimisme, l’OIT y voit d’abord un levier de progrès sans équivalent : “Les systèmes et outils reposant  sur  l’IA  renforcent  la  sécurité  au  travail  en  identifiant  les  dangers,  en  surveillant  les conditions  environnementales  et  en  prédisant  les défaillances d’équipements.
Les technologies numériques permettent tout d’abord d’éloigner les salariés des environnements à haut risque : mines, chantiers, ateliers exposés à la chaleur ou aux produits chimiques. L’automatisation des tâches dites « 3D » – dégradantes, dangereuses ou dégoûtantes – réduit en effet l’exposition à de nombreux risques et facteurs de pénibilité : bras robotisés pour la soudure, drones pour le déminage ou la pulvérisation de pesticides, exosquelettes pour le travail de force. Dans le secteur hospitalier, des robots peuvent assurer la désinfection, transporter les patients ou même réaliser des prélèvements, limitant ainsi l’exposition du personnel soignant aux risques infectieux.
Autre exemple : les systèmes prédictifs de maintenance pilotés par IA préviennent les pannes d’équipement avant qu’elles ne provoquent un accident. Or, contrairement à une idée reçue, ces innovations ne se cantonnent plus à l’industrie lourde : elles gagnent la logistique, l’agriculture, les services, via des solutions de plus en plus abordables. Même dans de modestes TPE, des robots ou logiciels intelligents prennent en charge les tâches répétitives, laissant aux humains les activités plus qualifiées, décisionnelles ou créatives.

Surveillance intelligente : un nouveau champ d’action

L’OIT analyse aussi la révolution que représente la surveillance numérique intelligente. Capteurs, objets connectés, dispositifs portables, drones et vidéos analysées par l’IA permettent aujourd’hui de suivre en temps réel les conditions de travail et les risques auxquels sont exposés des salariés. Ces systèmes peuvent, par exemple, suivre en temps réel les niveaux de bruit, la qualité de l’air ou encore la fatigue des travailleurs.
Casques connectés, vêtements intelligents, gants détecteurs de substances chimiques, montres mesurant le stress ou la température corporelle : ces outils génèrent un flux continu de données sur l’exposition au risque, l’effort et la vigilance. Les entreprises pionnières, notamment dans la construction ou la logistique, y recourent déjà pour anticiper et prévenir les accidents : une alerte se déclenche en cas de posture dangereuse, de chaleur excessive ou de signes d’épuisement (voir encadré).

L’IA comme outil prédictif et collaboratif

Au-delà de la détection, l’intelligence artificielle devient un véritable outil de prévention prédictive. En croisant les données issues des capteurs, des historiques d’accidents et des profils de postes, les algorithmes identifient les combinaisons à risque et suggèrent des mesures adaptées.
L’OIT cite l’exemple d’un grand réseau de travail temporaire européen ayant développé un outil d’IA “capable d’analyser plus de 30 facteurs de risquepour prévenir les accidents parmi les intérimaires. Résultat : des formations personnalisées et une intégration plus sûre sur les sites.
Des applications similaires se développent dans le transport, la logistique ou le bâtiment : les caméras embarquées avec IA analysent la vigilance des conducteurs et émettent des alertes dès les premiers signes de somnolence ou d’inattention. Ces solutions, déjà accessibles pour des flottes modestes, illustrent la démocratisation rapide de la prévention intelligente.

De nouveaux risques à maîtriser

Mais cette révolution numérique n’est pas sans contreparties. L’OIT appelle à “gérer  avec  soin  les  risquesémergents  liés aux technologies numériques:

  • défaillances techniques ou comportements imprévisibles de robots, problèmes ergonomiques liés à des exosquelettes mal adaptés ;
  • risques psychosociaux dus à la surveillance continue, à l’intensification du travail ou au sentiment de perte d’autonomie ;
  • inégalités accrues entre salariés qualifiés et non qualifiés, ou selon le genre, du fait de dispositifs conçus sans prise en compte des différences morphologiques.

Le rapport souligne aussi le risque de “stress technologique”, conséquence directe de la vitesse d’évolution des outils : obligation d’apprendre en continu, crainte de la panne ou du remplacement, surcharge cognitive liée à la supervision de systèmes automatisés.
Enfin, l’OIT rappelle que l’effacement des frontières entre vie privée et vie professionnelle, notamment avec le télétravail et la connectivité permanente, fait peser de nouvelles tensions sur l’équilibre psychologique des salariés. Lire la suite