Prévenir les risques psychosociaux
Ce qu’enseignent les données statistiques
À l’instar des risques physiques, les risques psychosociaux auxquels sont exposés les salariés doivent faire l’objet d’une évaluation et être pris en compte dans le Document unique d’évaluation des risques professionnels (DUER). Pour s’acquitter de cette tâche délicate, il n’est pas inutile de consulter une récente note de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) du ministère du Travail consacrée au suivi statistique de ces risques spécifiques. D’autant qu’elle confirme que la réduction de ces risques contribue à améliorer la performance des entreprises.
En s’appuyant sur les résultats de l’enquête Sumer de 2010, les analystes de la Dares ont mis en évidence les situations de travail qui accroissent les risques psychosociaux. La méthodologie retenue repose sur l’analyse de six dimensions : les exigences du travail, les exigences émotionnelles, l’autonomie et les marges de manœuvre, les rapports sociaux et les relations de travail, les conflits de valeurs et l’insécurité économique. Pour réaliser une évaluation pertinente des risques, il convient en effet de combiner ces facteurs.
Des facteurs de risques à combiner
Ainsi, comme le précise le modèle de Karasek, une forte demande psychologique est généralement bien supportée par les salariés si, dans le même temps, ces derniers bénéficient d’une importante latitude décisionnelle et d’un solide soutien social de la part de ses collègues et de sa hiérarchie. En revanche, une situation de travail cumulant forte demande, faible latitude décisionnelle et faible soutien se révèle extrêmement néfaste pour la santé psychique.
L’évaluation des risques psychosociaux passe donc par une analyse fine des contraintes pesant sur les différents postes de travail. En s’appuyant sur les données de l’enquête Sumer, la Dares est ainsi en mesure d’affirmer que “les employés administratifs, les ouvriers non qualifiés et les employés de commerce et de service sont plus souvent en situation d’être ‘tendus’ parce qu’ils cumulent une forte demande psychologique avec une faible latitude décisionnelle”, tandis qu’à l’inverse, “les métiers de cadres, notamment les ingénieurs et les cadres techniques de l’industrie, sont soumis à une forte exigence au travail, donc au stress, mais bénéficient davantage de marges de manoeuvre pour y répondre”.
D’autres facteurs sont également à prendre en compte. Parmi eux, le sentiment d’être en mesure d’accomplir correctement son travail apparaît ainsi prépondérant. “Les risques psychosociaux au travail peuvent également résulter d’une inadéquation entre les objectifs fixés aux salariés et les moyens dont ils disposent pour faire un travail de qualité. Les salariés qui déclarent ne pas avoir assez de moyens matériels, d’informations ou de coopération avec leurs collègues pour « faire correctement leur travail » ont une probabilité plus forte d’être tendus”, remarquent les experts.
Une cause majeure d’absentéisme
Cette dernière observation n’est pas anodine. Elle démontre en effet que la résolution des risques psychosociaux est souvent aussi, pour l’entreprise, une occasion de résoudre des problèmes organisationnels ou managériaux ayant un impact négatif sur le fonctionnement et la performance de l’entreprise. D’autant que les salariés subissant des facteurs de risques psychosociaux ne sont pas seulement plus souvent plus anxieux ou dépressifs. Ils sont aussi plus souvent victimes d’accidents du travail et présente un taux d’absentéisme supérieur à la moyenne. “Le risque de déclarer trois arrêts de travail dans l’année est plus que doublé pour les hommes et les femmes qui subissent des tensions. Ce risque est multiplié par 3 pour les femmes et par 4 pour les hommes qui déclarent manquer de reconnaissance”, observe la Dares.
(1) “L’organisation du travail à l’épreuve des risques psychosociaux”, Dares Analyses n°04, janvier 2016.