Dans l’urgence de la crise sanitaire, de nombreuses entreprises ont expé­rimenté de nouvelles façons de travailler pour maintenir leur activité tout en assu­rant la sécurité de leurs salariés. Au-delà même des prescriptions du protocole sanitaire, elles ont fait preuve d’une belle créativité en tournant le dos aux routines les mieux établies.

Nouvelles pratiques et nouveaux risques

Comme le souligne une récente étude du ministère du Travail (voir dossier pp. 2 et 3), “les pratiques ont évolué et les formes d’organisation du travail ont été modifiées pour s’adapter au contexte”. Toutefois, il est certain que nombre de ces innova­tions sont appelées à perdurer après la crise. Pour ne prendre qu’un exemple, le télétravail occupera évidemment demain, dans les entreprises, une place bien plus importante que celle qui était la sienne auparavant. Et de la sorte, c’est l’organisa­tion globale des entreprises qui va néces­sairement évoluer.

Afin de réussir ces transformations, la prise en compte des enjeux de santé et de sécurité sera incontournable. En effet, comme le précise le Code du travail, “lors de toute décision d’aménagement important modifiant les conditions de santé, d’hygiène et de sécurité ou les conditions de travail dans l’entreprise”, le document unique d’évalua­tion des risques professionnels (DUER) doit être mis à jour.

Bien entendu, la plupart des modifications de l’organisation du travail entrent dans ce champ. L’analyse de l’impact qu’a eu la crise sanitaire sur les conditions de tra­vail démontre en effet que les nouvelles pratiques adoptées à cette occasion ont systématiquement modifié la cartographie des risques présents dans les entreprises. Bien évaluer les risques de façon à pou­voir les prévenir efficacement sera donc une condition du succès des changements souhaités.

Cette démarche s’impose notamment lors de la mise en place du télétravail dont les experts s’accordent à dire que, contraire­ment à une idée reçue, il ne débouche pas systématiquement sur une amélioration des conditions de travail. C’est la raison pour laquelle, dans les grandes structures comme dans les plus modestes, le déploie­ment du télétravail s’accompagne, de plus en plus fréquemment, d’un effort de for­mation express des salariés et des mana­gers concernés, notamment pour les sen­sibiliser aux risques que comporte cette nouvelle façon de travailler.

La prévention des risques au service du changement

Plus globalement, lier nouvelles organi­sation du travail, prévention des risques et amélioration des conditions de travail sera le meilleur moyen de s’assurer de l’engagement de l’ensemble des membres de l’entreprise dans les projets de chan­gement envisagés. Une récente étude de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail, avertit : “l’organisation et les conditions de travail constituent le principal sujet de dia­logue social identifié par les représentants du personnel dans l’après-crise sanitaire”.

De la sorte, une tendance lourde se confirme : loin de ne représenter qu’une question purement technique ou régle­mentaire, la prévention des risques profes­sionnels s’impose de plus en plus comme une question managériale de première importance.

François Sidos Président du Groupe Pôle Prévention