« La nécessité d’enchaîner les livraisons pour atteindre un niveau de rémunération suffisant, l’absence de pause formalisée, l’isolement professionnel et l’absence de soutien hiérarchique direct génèrent du stress, de la fatigue et un risque d’épuisement ».

Dans une étude publiée en mars dernier, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) dresse un constat préoccupant sur les conditions de travail des livreurs de repas des plateformes numériques (1).

Risques physiques liés à la circulation en milieu urbain

Les livreurs, majoritairement à vélo ou à deux-roues motorisé, sont confrontés quotidiennement aux dangers de la route. « Leur activité s’exerce principalement en milieu urbain, dans un environnement de travail difficile et potentiellement hostile », souligne l’Anses. L’agence évoque un cumul de facteurs aggravants : densité du trafic, non-respect des règles de priorité, chaussées dégradées, et coexistence parfois conflictuelle avec les autres usagers, notamment les automobilistes.

Ces conditions accroissent le risque d’accidents, de chutes et de blessures, souvent sous-déclarés en l’absence de statut salarié. La conduite prolongée, les manœuvres rapides, le port d’un sac isotherme lourd (pouvant atteindre jusqu’à 10 kg) et l’exposition aux intempéries peuvent aussi engendrer des troubles musculosquelettiques (TMS) au niveau du dos, des poignets et des épaules.

Risques psychosociaux liés au management algorithmique

L’Anses pointe aussi l’organisation du travail via des plateformes numériques qui « se traduit par une grande incertitude dans la planification des journées et des revenus ». Les algorithmes attribuent les commandes en temps réel selon des critères opaques, souvent liés à la rapidité, à la géolocalisation ou encore au taux d’acceptation des livraisons. Ce fonctionnement crée une pression constante. Les livreurs doivent « rester connectés en permanence à l’application pour être disponibles et recevoir des courses ». La nécessité d’enchaîner les livraisons pour atteindre un niveau de rémunération suffisant, l’absence de pause formalisée, l’isolement professionnel et l’absence de soutien hiérarchique direct génèrent du stress, de la fatigue et un risque d’épuisement.

Avec cette étude, l’Anses met donc en évidence un cumul de risques professionnels, encore trop peu documentés jusqu’ici, mais dont les effets sur la santé physique et psychique des livreurs commencent à être mesurés.

(1) “Travailleurs des plateformes numériques de livraison de repas”, Avis de l’Anses, mars 2025, consultable sur http://www.anses.fr