“Les travailleurs âgés de 18 à 34 ans sont ceux qui ont le plus connu d’arrêts maladie au cours des 12 derniers mois. Ils sont 58 % dans ce cas contre 41 % pour les 50 ans et plus…C’est chez ces jeunes adultes que la progression des arrêts maladie est la plus importante : + 14 points contre + 7 points pour les 50 ans et plus. ”

S’il est un sujet sur lequel le ressenti des employeurs est validé par les statistiques, c’est bien celui de l’absentéisme. Le dernier baromètre réalisé par le groupe de protection sociale Malakoff Humanis fait ainsi état d’une nouvelle progression spectaculaire, quelque 50 % des salariés français ayant été au moins une fois en arrêt maladie dans les douze derniers mois. Face à ce phénomène ravageur pour les entreprises et la société, il est toutefois possible d’agir.

Les chiffres sont tout simplement alarmants. Malgré la sortie de la crise sanitaire, la prescription d’arrêts maladie augmente encore cette année et connaît une hausse continue depuis 3 ans.

1 salarié sur 2 arrêté

Quelque 50 % des salariés se sont vus prescrire un arrêt maladie au cours des 12 derniers mois, soit une progression de 8 points depuis l’année dernière et de 14 points depuis 2020.
L’indicateur atteint ainsi son plus haut niveau depuis 2016, battant le précédent record de 2019, où il s’établissait à 44 %.
Mais ce n’est pas tout ! Les arrêts multiples progressent également. 45 % des salariés se sont vus prescrire 2 arrêts de travail ou davantage lors des douze derniers mois, soit une progression de 4 points par rapport à 2022. De même, 45 % ont été arrêtés au cours des 12 derniers mois et au cours des 2 dernières années. Or, ils n’étaient “que” 39 % dans ce cas en 2022 et 33 % en 2021.

Les arrêts longs…de plus en plus longs !

De surcroît, les arrêts maladie prescrits sont de plus en plus longs. Ainsi, le nombre moyen de jours prescrits dans le cadre des arrêts longs (arrêts d’une durée supérieure à 1 mois) a augmenté de 14 jours pour atteindre 111 jours en 2023 !
Autre indicateur inquiétant tant il révèle un problème profond : selon une étude de perception menée par l’IFOP pour Malakoff Humanis, seuls 50 % des salariés s’estiment en bonne santé physique et mentale, soit une baisse de 6 points en un an.

Les jeunes travailleurs davantage concernés

On pourrait croire que cette explosion de l’absentéisme est avant tout liée au vieillissement de la population active. Mais il n’en est, hélas, rien. En effet, les travailleurs âgés de 18 à 34 ans sont ceux qui ont le plus connu d’arrêts maladie au cours des 12 derniers mois. Ils sont 58 % dans ce cas contre 41 % pour les 50 ans et plus… C’est chez ces jeunes adultes que la progression des arrêts maladie est la plus importante : + 14 points contre + 7 points pour les 50 ans et plus.
L’autre catégorie de salariés particulièrement sujette aux arrêts maladie est celle des managers. 53 % d’entre eux se sont vus prescrire un arrêt maladie, soit une hausse de 13 points par rapport à 2022.

Les TPE et PME frappées à leur tour

Autre mauvaise nouvelle : les TPE et PME qui, jusqu’ici, résistaient mieux que les grandes entreprises à la marée montante de l’absentéisme, sont frappées à leur tour. En effet, les entreprises de 10-49 salariés connaissent le plus fort taux de croissance de l’absentéisme : +18 points atteignant quasiment le même taux que les plus grandes entreprises (54 %).
Pour de nombreux observateurs, la fin de cette exception démontre que la lutte contre l’absentéisme doit faire l’objet d’un véritable sursaut à l’échelle de la société tout entière. Toutefois, cette nécessaire prise de conscience globale n’implique nullement qu’il n’y ait rien à faire au sein de chaque entreprise, bien au contraire !

L’enjeu majeur des conditions de travail

À cette fin, les principaux motifs d’arrêts maladie recensés peuvent orienter l’action. Même si l’entreprise peut également agir à la marge sur les maladies ordinaires (28 % des arrêts), les principaux gisements de progrès concernent, sans aucun doute, les troubles musculosquelettiques (13 %) et les troubles psychologiques (15 %), ces derniers étant par ailleurs la première cause de prescription d’arrêts longs. Quelque 31 % des arrêts d’une durée supérieure à 30 jours sont dus à des troubles psychologiques. Comme le souligne Anne-Sophie Godon Rensonnet, directrice du Département Études stratégies et Recherche chez Malakoff Humanis, “cela confirme l’enjeu à travailler la qualité et les conditions de vie au travail au sein des entreprises pour être en mesure de contrôler, réduire le nombre des arrêts longs”.
De la sorte, elle souligne un point clef : la résolution du problème de l’absentéisme exige bien sûr l’exemplarité dans la prévention des risques professionnels. Mais elle nécessite que les entreprises aillent au-delà en s’engageant dans une démarche d’amélioration des conditions de travail conduite en lien avec les salariés. Cette dynamique de progrès figure au cœur de la loi du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail. Mais elle est sans nul doute le principal levier dont disposent les entreprises pour conjurer le péril que représente la hausse continue de l’absentéisme.