LES “COBOTS”. De nouveaux alliés pour les travailleurs ?

« Loin des mythes de la science-fiction, le cobot n’est jamais intrinsèquement brutal ni maladroit : il exécute simplement les tâches qu’on lui confie en fonction de ses capacités et des paramètres qui lui ont été transmis »

Les robots collaboratifs ou « cobots », conçus pour travailler avec les humains en milieu industriel, se démocratisent. De plus en plus d’entreprises en acquièrent pour seconder leurs salariés dans des tâches répétitives. Cependant, cette cohabitation n’est pas sans risque, d’autant que la réglementation paraît loin d’avoir tout prévu.

Améliorer de 10 % la productivité d’une activité de pliage ou encore accroître de 40 % la cadence de ponçage. Telles sont, par exemple, quelques-unes des performances dont est capable un « cobot » conçu par un des principaux fabricants présents sur le marché en plein essor des robots collaboratifs. Le cobot appartient à la famille des robots industriels mais il se distingue de ses aînés, tels que les robots de soudure ou de peinture présents dans l’industrie automobile. Ces derniers s’activent dans un espace sécurisé où nul opérateur ne pénètre durant la phase de production. Les cobots, quant à eux, ont été conçus dans le but de collaborer avec des opérateurs. Ils se présentent sous la forme d’un bras articulé, multidimensionnel, auquel on raccorde des accessoires adaptés aux métiers. Les modèles les plus simples se négocient à moins de 10000 € contre plusieurs dizaines de milliers d’euros pour les plus sophistiqués (finesse des capteurs) avec leurs accessoires (tels qu’une ponceuse, une pince…). Ces tarifs ne les destinent pas au grand public mais ils sont à la portée de PME-PMI en quête d’un moyen d’optimiser leur production. Cependant, un cobot ne s’installe sans précaution ni acculturation des opérateurs.

La réglementation à la traîne

« La sécurité représente un défi pour la mise en œuvre de la cobotique, entre autres, en raison du manque de compréhension des normes de sécurité et des difficultés associées à l’appréciation des risques », alerte un rapport de l’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail (IRSST) (1). Cet organisme, équivalent de l’INRS en France, fait autorité au Québec. Il est le premier à s’intéresser à la cobotique, du moins au rôle des intégrateurs c’est-à-dire de ceux qui programment ces robots afin qu’ils travaillent efficacement mais sans mettre en danger les opérateurs présents dans leur environnement. Lire la suite

Les bureaux se refont une beauté pour faire revenir les travailleurs

« Pour faire revenir leurs salariés, les entreprises ont donc intérêt à veiller à leur proposer des bureaux non seulement fonctionnels mais esthétiques ».

Alors que beaucoup d’entreprises opèrent un rééquilibrage entre temps de présence au bureau et télétravail, une récente enquête de l’IFOP (1) met en évidence l’atout que représente la qualité esthétique des lieux de travail pour y faire revenir les salariés.

La beauté des locaux, source de bien-être professionnel

Sans surprise, l’enquête confirme que les bureaux esthétiques et bien tenus dopent le bien-être professionnel. En effet, “les salariés qui accordent une note esthétique très élevée à leurs bureaux (supérieure ou égale à 9 sur 10) ont également une note de bien-être largement supérieure (8,9 contre 7,1 en moyenne pour l’ensemble des salariés). À l’autre bout du spectre, ceux qui accordent une note esthétique égale ou inférieure à 5 /10 à leur lieu de travail, affichent une note de bien-être moyenne de 5,9, soit 1,2 point de moins que la moyenne générale”.

Compétition entre bureau et domicile

L’enquête démontre aussi que les salariés ayant la possibilité de télétravailler ont tout naturellement tendance à comparer leur bureau avec leur domicile. Si bien que les salariés qui estiment que leur espace de travail est “plus beau chez eux” pratiquent plus de travail à distance : 2,1 jours par semaine, contre 1,5 jour en moyenne. Or, selon l’enquête, ce serait aujourd’hui l’opinion de 43 % des travailleurs.

Pour faire revenir leurs salariés, les entreprises ont donc intérêt à veiller à leur proposer des bureaux non seulement fonctionnels mais esthétiques. C’est tout à fait possible : dès à présent, 53 % des salariés estiment que “leur bureau est un lieu de vie où ils aiment passer du temps” plutôt qu’“uniquement un lieu de travail où ils préfèrent passer le moins de temps possible”.

(1) 11e baromètre SFL-IFOP Paris Workplace 2024, novembre 2024, consultable sur www.ifop.com

Violences externes – Comment protéger ses salariés ?

« Un climat d’insécurité génère toujours une dégradation du climat social et empêche les salariés de développer leur potentiel. Il plombe l’enthousiasme et la motivation, entrave la créativité, accroît l’absentéisme et amoindrit la loyauté envers l’entreprise et envers les clients… »

Chauffeurs de bus, enseignants, médecins, guichetiers d’agences bancaire, téléopérateurs, commerçants, caissières de supermarché, releveurs de compteur, livreurs, agents d’entretien, réparateurs, etc. Les travailleurs en contact avec le public sont de plus en plus nombreux à subir des actes de violences de la part de clients, d’usagers ou de patients. Face à ce vent mauvais, entreprises et administrations peuvent – et même doivent – prendre des mesures pour protéger la santé physique et mentale de leurs employés.

Le constat est hélas largement partagé selon un récent sondage de l’Institut: Elabe, “77 % des Français font le constat d’une société de plus en plus violente” et 60 % déclarent se sentir souvent (17 %) ou de temps en temps (43 %) “inquiets pour leur propre sécurité”. Or, cette montée de la violence n’épargne évidemment pas le monde du travail, de nombreux travailleurs étant exposés à ce que l’on appelle les “violences externes”. En 2010, 15 % des salariés du régime général et 23,5 % des salariés de la fonction publique déclaraient avoir subi au moins une agression verbale au cours des douze derniers mois. Et ils étaient respectivement 2 % et 4 % à signaler avoir été victime d’au moins une agression physique durant la même période. Or, chacun sait que la situation est très loin de s’être améliorée depuis…

Une grande variété de violences

Pour cerner l’ampleur du phénomène, il faut d’abord bien comprendre que les violences externes ne sont pas constituées des seuls actes criminels. Comme le souligne l’INRS, elles comprennent en effet l’ensemble des “insultes, menaces, agressions physiques ou psychologiques, exercées contre une personne sur son lieu de travail, par des personnes extérieures à l’entreprise, y compris des clients et qui mettent en péril sa santé, sa sécurité ou son bien-être”.
Les violences externes ne se limitent donc nullement aux actes pouvant donner lieu à des poursuites pénales. Ainsi, un employé de service après-vente régulièrement exposé à la colère des clients qu’il gère est incontestablement victime de violences externes, même si l’agressivité de ceux-ci relève de la simple grossièreté et ne les expose pas à des poursuites.

De multiples facteurs de risque

Pour identifier les causes de l’explosion des violences externes, l’INRS évoque plusieurs facteurs de risque. Il pointe ainsi des causes économiques et sociales, comme la précarité de certains publics et des causes socioculturelles comme “l’évolution des codes du savoir-vivre ensemble”. “Les manières de parler, d’interpeller l’autre, de se comporter avec lui… divergent selon les valeurs, les codes culturels et les modes d’éducation de chacun”, observent les experts.

Mais il faut aussi compter avec des facteurs liés à l’organisation de l’entreprise ou à la gestion de la relation avec les clients ou les usagers. Ainsi, des produits ou services ne correspondant pas aux attentes du client ou délivrés avec retard démultiplient bien évidemment les occasions de tensions. Lire la suite

Les difficultés persistantes des “travailleurs invisibles”

“Les Invisibles travaillent en moyenne 10% moins que les autres actifs, mais gagnent 32 % de moins, et 13 % ne parviennent pas à subvenir à leurs besoins primaires ».

Ils sont agents d’entretien, aides à domicile, caristes, aides-soignants, vigiles, livreurs, éboueurs, caissiers ou encore ouvriers agricoles… Quatre ans après la crise sanitaire du Covid 19, qui avait révélé leur contribution essentielle au fonctionnement de l’économie et de la société, ces 11 millions de « travailleurs invisibles » viennent de faire l’objet d’une étude qui révèle leurs difficiles conditions de travail et de vie.

“Les Invisibles travaillent en moyenne 10% moins que les autres actifs, mais gagnent 32 % de moins, et 13 % ne parviennent pas à subvenir à leurs besoins primaires. À cette vie d’arbitrages et de frustrations s’ajoute une pénibilité professionnelle qui amène seulement un Invisible sur quatre à se sentir en capacité d’exercer son activité jusqu’à la retraite. Ils sont par ailleurs plus nombreux à travailler avec des horaires atypiques et morcelés, et disposent de moins d’autonomie dans l’organisation de leur travail et la gestion de leur temps”, notent les auteurs de l’étude que la fondation Travailler Autrement a récemment consacrée à ces travailleurs de première ligne.

Conditions de travail (et de vie)

Mais l’intérêt de l’étude tient au fait que loin de s’en tenir aux seules conditions de travail de cette population, elle se penche aussi sur leurs conditions de vie. En effet, au-delà de vies professionnelles fortement marquées par la précarité et la pénibilité, ces travailleurs affrontent aussi d’autres contraintes, notamment familiales et territoriales, qui, en se cumulant, aboutissent à “des vies davantage subies que choisies”. Ainsi, “42 % des Invisibles éprouvent des difficultés à conjuguer leur vie professionnelle et le rythme scolaire de leurs enfants, mais ils sont aussi plus nombreux que les autres actifs à s’absenter du travail pour garder leurs enfants, faute de moyens ou de proches disponibles pour s’occuper de leurs enfants.” Enfin, “si chez les Invisibles, la voiture reste le mode de transport le plus utilisé pour se rendre au travail, ils sont moins de la moitié à faire le plein quand ils se rendent à la pompe à essence.

Leurs dépenses mensuelles dédiées aux déplacements sont plus élevées que celles des autres actifs”, notent les auteurs. L’étude alerte aussi sur le facteur amplificateur de difficultés que représente l’explosion des familles monoparentales. “La monoparentalité, souvent subie, agit comme un facteur qui impacte, amplifie et aggrave tous les autres, et complexifie le quotidien. Le foyer, c’est le bâti, le socle, l’ossature, quand celui-ci est sécurisé. Fragile, c’est tout l’édifice de vie des Invisibles qui vacille”.  Or la monoparentalité, est 4 fois plus élevée dans les familles d’Invisibles que chez les autres actifs…

Ce tableau éloquent est d’une grande utilité pour les employeurs qui entendent lancer des actions d’amélioration des conditions de travail. Pour prendre des mesures pertinentes, il est en effet crucial de ne pas faire abstraction des difficultés que rencontrent les travailleurs dans les autres aspects de leur vie.

Pour en savoir plus : une synthèse de l’étude est disponible sur le site de la fondation : www.fondation-travailler-autrement.org.

La culture de prévention, nouvel horizon de la santé et la sécurité.

“De nombreux éléments concourent à la prévention, comme les normes ou la réglementation. Mais nous arrivons à un niveau où chaque personne au sein de l’entreprise doit intégrer elle-même la culture de prévention pour parvenir à éviter des situations qui n’auraient pas été anticipées.”

Depuis quelques années, la “culture de prévention” a pris une place croissante dans l’univers de la santé et de la sécurité au travail. Et sa promotion a même été élevée au rang de priorité par le 4e Plan Santé au travail chargé de structurer, sur ces sujets, l’action de l’État jusqu’en 2025.

L’essor de la culture n’est pas une surprise car il s’inscrit dans l’évolution qu’a connue, au fil du XXe siècle, la façon dont nous appréhendons les risques professionnels. En simplifiant à l’extrême, il s’est agi de rompre avec le fatalisme en passant d’une logique de réparation des dommages à une dynamique de prévention des risques.
Comme on le sait, cela a permis d’immenses progrès: on compte aujourd’hui un peu plus de 30 accidents du travail pour 1000 salariés contre 120 dans les années 1950 ! Toutefois, depuis quelques années, cette amélioration jamais interrompue depuis 70 ans a connu un certain effet de seuil. L’objectif visé par la promotion de la culture de prévention consiste à franchir un nouveau palier en utilisant de nouveaux leviers.

Attention collective aux risques

Lors d’un colloque consacré, en 2019, à la culture de prévention (1), Marine Jeantet, directrice des risques professionnels à la Caisse nationale de l’assurance maladie (CNAM) résumait ainsi cette petite révolution : “De nombreux éléments concourent à la prévention, comme les normes ou la réglementation. Mais nous arrivons à un niveau où chaque personne au sein de l’entreprise doit intégrer elle-même la culture de prévention pour parvenir à éviter des situations qui n’auraient pas été anticipées. Il faut changer de braquet et d’outils pour parvenir à casser cet effet de seuil.”
On ne saurait être plus clair : la culture de prévention prend acte qu’il serait vain d’ajouter encore et encore de nouvelles strates de règles et de normes tatillonnes et contraignantes. Si bien que la solution passe plutôt par la promotion au sein même des entreprises, d’une dynamique d’attention collective aux risques. La culture de prévention mise sur l’agilité et la créativité des acteurs de terrain. Lire la suite