Accident de travail : quand le doute est permis

Lorsqu’un accident intervient sur le lieu de travail ou pendant le temps de travail, il est automatiquement présumé être d’origine professionnelle, conformément à l’article L 411-11 du Code de la sécurité sociale. En cas de doute, l’employeur doit formuler des réserves. En effet, celles-ci peuvent entraîner des répercussions sur la décision de la CPAM, comme le démontre l’affaire suivante.

Quelle que soit son opinion sur les causes de l’accident, l’employeur doit faire une déclaration auprès de la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM). Il a néanmoins la faculté d’assortir sa déclaration de réserves, et a tout intérêt à le faire, en cas de doute quant à l’origine professionnelle de l’accident. De cette manière, il peut contraindre la CPAM à mettre en œuvre une instruction du dossier pour vérifier que l’accident est bien imputable au travail. Encore faut-il que les réserves de l’employeur soient motivées.

La CPAM ne diligente pas d’enquête

Le 30 novembre 2016, Monsieur X, salarié d’une entreprise alsacienne spécialisée dans la fabrication de machines et équipements, ressent une vive douleur au côté gauche alors qu’il manipule une porte coulissante. L’accident ayant eu lieu sur le lieu du travail et pendant les heures de travail, l’employeur n’a pas d’autre choix que de le déclarer à la CPAM du Bas-Rhin, dont il dépend, malgré de sérieux doutes sur la matérialité des faits. Quelques jours plus tard, le 5 décembre 2016, il prend le soin d’adresser à la CPAM une lettre dans laquelle il exprime ses réserves quant au caractère professionnel de l’accident.

Rappelons toutefois que la faculté pour l’employeur de formuler des réserves en cours d’instruction et dans un délai de dix jours, lui est accordée par l’article R441-11 du Code de la sécurité sociale. Dès lors que l’employeur use de cette faculté et émet des réserves motivées sur le caractère professionnel de l’accident, la CPAM doit avant toute décision faire une enquête administrative auprès du salarié victime et de son employeur, par le biais d’un questionnaire à remplir et à renvoyer.

Etonnement, en dépit des réserves exprimées par l’employeur, la CPAM décide, dès le 14 décembre 2016 et sans diligenter des mesures d’instruction, de reconnaître le caractère professionnel de l’accident.

L’employeur saisit dès lors, tout naturellement, la juridiction sociale afin que cette décision lui soit déclarée inopposable, en l’absence d’instruction préalable. Il est pourtant débouté par la cour d’appel de Colmar le 16 janvier 2020. Celle-ci estime en effet que les réserves exprimées par l’employeur, dans sa lettre du 5 décembre 2016, n’étaient pas suffisamment motivées dispensant de fait la CPAM de procéder à une instruction préalable. Autrement dit, la CPAM est dans l’obligation de procéder à une instruction, uniquement en cas de réserves motivées. Lire la suite

Les risques humains – 1ère source de préoccupation des patrons de PME et ETI

“Parmi les PME, les risques les plus redoutés sont les accidents du travail (66 %), les arrêts maladie ou maladies professionnelles (62 %), devant les difficultés de recrutement (56 %) et la démission de collaborateurs clés (43 %).”

Interrogés par l’assureur QBE sur les principaux risques qui menacent leur entreprise, 79 % des dirigeants de petites et moyennes entreprises (PME) et d’entreprises de taille intermédiaire (ETI) citent les “risques humains” regroupant les accidents du travail, les arrêts maladies et les maladies professionnelles, ainsi que les difficultés de recrutement ou démission de collaborateurs clés.

Parmi les PME, les risques les plus redoutés sont les accidents du travail (66 %) et les arrêts maladie ou maladies professionnelles (62 %). Contrairement à une idée reçue, ces risques liés aux conditions de travail préoccupent bien davantage les dirigeants d’entreprise que les risques matériels (55 %) ou que les risques du marché (48 %). Et cette donnée est d’autant plus significative que les patrons interrogés placent la gestion des risques en tête des “éléments stratégiques pour la compétitivité des entreprises”, juste après la stratégie commerciale.

Ces résultats vont donc à l’encontre du lieu commun selon lequel les patrons de PME considéreraient avant tout les obligations qui leur incombent en matière de santé et de sécurité comme des contraintes. Ils révèlent que pour un nombre croissant de dirigeants de PME, la prévention des risques est, au contraire, un facteur déterminant du bon fonctionnement de l’entreprise.

Les patrons expriment donc une claire volonté de faire. Reste maintenant à leur en donner les moyens. Lire la suite

Prévenir les chutes de plain-pied

“Les chutes de plain-pied ont été l’origine de 17 % des accidents du travail reconnus par l’Assurance Maladie au cours de l’année 2020. Elles sont ainsi la seconde cause d’accidents, derrière les manutentions manuelles (50 %) mais devant les chutes de hauteur (12 %).”


Les chutes de plain-pied ou de faible hauteur sont la deuxième cause d’accidents du travail et ce quel que soit le secteur d’activité. Or, comme le savent les Intervenants en prévention des risques professionnels (IPRP), ces chutes peuvent être prévenues avec des mesures, généralement très simples à mettre en œuvre. Une récente campagne de l’INRS les présente. En voici une synthèse.

Sécuriser les déplacements dans les locaux

L’immense majorité des chutes de plain-pied ont lieu lorsque les salariés se déplacent sur leur lieu de travail. Les premières mesures à prendre pour prévenir les chutes visent à sécuriser ces déplacements.

Les recommandations de l’INRS :


– Évitez l’encombrement des locaux et les obstacles, en prévoyant des zones dédiées au stockage et en s’assurant qu’aucun fil ou câble n’entrave la circulation.

– Assurez un éclairage adéquat des zones de circulation : 100 lux minimum, non éblouissant et aisément activable.

Limitez le risque de glissades, en choisissant des revêtements de sols adaptés et, dans certaines activités à risques, en dotant les salariés de chaussures de travail anti-dérapantes.

– Maintenez les allées de circulation en bon état, en nettoyant immédiatement les sols souillés et en réparant les revêtements dégradés.

– Définissez un plan de circulation, si celui-ci n’est pas intuitif.

– Sensibilisez les salariés, en les incitant notamment à ne pas consulter leurs téléphones et tablettes lorsqu’ils se déplacent. Lire la suite

Accidents du travail et maladies professionnelles en 2020 – Baisse généralisée sauf pour les RPS

“L’année 2020 a été marquée par une crise sanitaire sans précédent et par des mesures de sécurité sanitaire extraordinaires, en particulier avec la mise en place du confinement. Les chiffres de la sinistralité reflètent cette situation atypique.

Les chiffres de la sinistralité 2020 publiés par l’Assurance maladie-risque professionnels reflètent la situation exceptionnelle résultant de la pandémie de Covid-19 et des mesures prises pour la combattre, tels que le recours au télétravail et aux périodes de confinement. En effet, si ces statistiques sont marquées par une très forte baisse des accidents du travail, de trajet et des maladies professionnelles, celle-ci est proportionnelle à la baisse de l’activité économique enregistrée durant cette période. En revanche, les risques psychosociaux ont, eux, littéralement explosés par rapport à 2019. Ces données confirment ainsi de façon éclatante que l’évaluation et la prévention des risques professionnelles doivent systématiquement prendre en compte les changements de toutes natures qui impactent le fonctionnement des entreprises.

Baisse de 17,7 % des accidents corrélée à la baisse d’activité

En 2020, le nombre d’accidents du travail a diminué de 17,7 % par rapport à 2019, avec moins de 540000 accidents (contre près de 656000 en 2019. Toutefois, ce bon résultat s’explique avant tout par la baisse d’activité induite par l’épidémie de Covid-19 et par les mesures drastiques prises pour la combattre. L’Assurance maladie souligne qu’elle concerne en particulier les deux périodes de confinement de l’année 2020. Lire la suite

Coordination SPS : les limites de responsabilité du maître d’ouvrage

Pour prévenir les risques sur les chantiers, le recours à un coordonnateur en matière de sécurité et de protection de la santé (SPS) est indispensable au maître d’ouvrage. Sa défaillance peut être préjudiciable à tous les niveaux, comme le démontre l’exemple suivant.


Les chantiers de construction font sans conteste partie de ces lieux représentant un risque pour les salariés, notamment en raison de la présence de matériaux et d’équipements dangereux. La multiplication du nombre d’intervenants peut également être un facteur de risque que doit prévenir
le maître d’ouvrage. Mais quand deux entreprises interviennent de manière simultanée ou successive sur un chantier, une coordination en matière de sécurité et de protection de la santé (SPS) doit être organisée.
La loi impose en effet au maître d’ouvrage de désigner un coordonnateur SPS pour l’assister dans sa mission de prévention des risques. Mais il peut arriver que ce dernier n’exerce pas sa mission correctement. La responsabilité pénale du maître d’ouvrage peut-elle dès lors être engagée en cas d’accident de travail survenu et résultant de la mauvaise exécution de sa mission par le coordonnateur ? C’est ce que nous allons découvrir en analysant un cas réel.

Un accident qui accable le maître d’ouvrage


Sur un chantier de restructuration d’un centre commercial, réalisé dans la région de Lille, l’entreprise X, maître d’ouvrage délégué, a confié ce chantier à l’entreprise de travaux Y. Sont également intervenues deux autres entreprises sous-traitantes, que nous nommerons Z1 et Z2. En raison de la pluralité des intervenants sur le chantier, l’entreprise X, en sa qualité de maître d’ouvrage, va déléguer la coordination de la sécurité et la protection de la santé à une société tierce qui deviendra ainsi le coordonnateur SPS du chantier. Jusque-là, rien de plus normal.
Un mois après le début du chantier, alors que deux salariés de l’entreprise Z1 procèdent sur un échafaudage à la démolition d’un mur, un autre salarié de l’entreprise Z2, chargée des travaux d’électricité sur ce chantier, est victime d’un accident de travail dû à l’effondrement de ce mur. Cet accident lui occasionne une incapacité temporaire de travail de six semaines.
Comme il est d’usage en cas d’accident de travail survenu sur un chantier, une enquête est diligentée et ses résultats sont accablants pour l’entreprise X, maître d’ouvrage. Celle-ci met en évidence deux manquements graves : Lire la suite