Accident du travail mortel : 12 heures pour informer l’inspection du travail

Un décret du 9 juin dernier prévoit que lorsqu’accident du travail mortel survient dans son entreprise, l’employeur doit désormais informer l’Inspection du travail dans les 12 heures, sous peine d’une contravention.

« Lorsqu’un travailleur est victime d’un accident du travail ayant entraîné son décès, l’employeur informe l’agent de contrôle de l’inspection du travail compétent pour le lieu de survenance de l’accident immédiatement et au plus tard dans les douze heures qui suivent le décès du travailleur, sauf s’il établit qu’il n’a pu avoir connaissance du décès que postérieurement à l’expiration de ce délai. Dans ce cas, le délai de douze heures imparti à l’employeur pour informer l’agent de contrôle de l’inspection du travail court à compter du moment où l’employeur a connaissance du décès du travailleur », prescrit le nouvel article R4121-5 créé par le décret du 9 juin.

Renforcer la qualité des enquêtes

Comme le précise le ministère du Travail, cette nouvelle obligation vise à renforcer
la qualité de l’enquête car « des constats trop tardifs sont susceptibles de nuire à la manifestation de la vérité, compte tenu du risque d’altération des preuves. »
Le décret précise aussi les modalités pratiques de cette nouvelle obligation. Ainsi, l’information peut être “communiquée par tout moyen permettant de conférer une date certaine” et doit comporter :

  • le nom ou la raison sociale ainsi que les adresses postale et électronique, les coordonnées téléphoniques de l’entreprise ou de l’établissement qui emploie le travailleur au moment de l’accident ;
  • le cas échéant, le nom ou la raison sociale ainsi que les adresses postale et électronique, les coordonnées téléphoniques de l’entreprise ou de l’établissement dans lequel l’accident s’est produit si celui-ci est différent de l’entreprise ou établissement employeur ;
  • les noms, prénoms, date de naissance de la victime ;
  • les date, heure, lieu et circonstances de l’accident ;
  • l’identité et les coordonnées des té- moins, le cas échéant.

En l’absence d’information de l’inspection du travail, l’employeur encourt une contravention de 5e classe, soit une amende d’un montant maximum de 1500 €, pouvant aller jusqu’à 3000 € en cas de récidive.

Prévention des risques – Un antidote à l’absentéisme

En 2022, on a recensé en France quelque 8,8 millions d’arrêts maladie sur notre territoire, contre 6,4 millions dix ans plus tôt.

15 milliards d’euros dépensés en indemnités journalières…

Sans même compter l’impact ravageur qu’il a sur le fonctionnement des entreprises, cet absentéisme a contraint la Sécurité sociale à débourser 15 milliards d’euros en indemnités journalières l’année dernière…

Et ne croyez pas que ces mauvais résultats s’expliquent par la crise du coronavirus et les facilités accordées à cette occasion en matière d’arrêt de travail. En effet, il s’agit d’une tendance plus ancienne et plus profonde : selon la commission sénatoriale planchant sur la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023, entre 2012 et 2021, les dépenses liées aux arrêts de travail étaient déjà passées de 8,8 à 13 milliards. Dans un contexte budgétaire tendu, le gouvernement promet de réfléchir aux moyens d’alléger la facture pour l’État mais aussi pour les entreprises. En effet, selon le baromètre de l’absentéisme réalisé chaque année par le courtier en assurances Verlingue, le coût du maintien de salaire en 2022 représente déjà, pour les employeurs, l’équivalent de 3,7 % de la masse salariale ! Pour les entreprises, dont les résultats sont déjà fragilisés par un contexte économique morose et par la hausse du coût de l’énergie et de nombreuses matières premières, la lutte contre l’absentéisme représente dès lors un impératif vital. À cette fin, les experts de Verlingue suggèrent de mettre le paquet sur la prévention des risques professionnels.

Les ATMP à l’origine de 13 % des jours d’absence

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Santé & sécurité : une indispensable approche globale

Lorsque les salariés sont simultanément exposés à des contraintes physiques et psychosociales, le risque d’accident du travail augmente significativement.

“II n’y a pas d’un côté les risques psychosociaux et de l’autre les risques physiques, mais bien un effet cocktail”, explique Régis Colin, expert de l’INRS et auteur d’une récente étude portant sur le secteur de la santé et de l’aide à la personne (1).
Le lancement de cette étude visait à élucider les raisons pour lesquelles ce secteur professionnel a connu, à rebours de la tendance générale, une hausse de la fréquence des accidents du travail. À cette fin, l’auteur a consulté les données de l’enquête “Conditions de travail” de la Dares afin d’identifier les principaux facteurs de risque présents dans ces professions et leur éventuel impact sur la sinistralité.*

Les RPS associés à un surrisque d’accident

Or, les résultats ont démontré que si la plupart des risques physiques sont naturellement associés à un surrisque d’accident du travail, c’est également le cas de certains risques psychosociaux. “Seules deux catégories – l’intensité du travail et les conflits de valeur – ne sont pas associées à un surrisque. Toutes les autres le sont”, précise Régis Colin.
Sans surprise la corrélation est encore plus importante dans les cas de “polyexposition”. Lorsque les salariés sont simultanément exposés à des contraintes physiques et psychosociales, le risque d’accident du travail augmente significativement. Comme le souligne l’auteur, “le fait d’être soumis conjointement à une forte exposition aux risques physiques et à une forte exposition aux RPS multiplie par quatre le risque de survenue d’accident du travail par rapport à une personne non exposée”.

Prévention des risques et QVT vont de concert

Pour Régis Colin, ces résultats intéressent bien au-delà du seul secteur de la santé et de l’aide à la personne. En effet, ils montrent “qu’il est important de ne pas considérer uniquement les facteurs
de risques physiques – comme c’est encore souvent le cas – pour analyser la survenue des accidents du travail, mais également de prendre en compte, de la même manière, les facteurs psychosociaux.”
De façon plus radicale, ces observations plaident aussi pour une approche globale de la santé et sécurité combinant prévention des risques, amélioration des conditions de travail et promotion de la qualité de vie au travail. Elles valident aussi notre vision du document unique conçu non comme une simple photographie statique des risques présents comme un bilan d’étape dans une démarche de progrès continu au service de l’entreprise et de ses salariés.

Emmanuel Pochet
Directeur de Point Org Sécurité

L’intérim accroît le risque d’accident du travail

De nombreuses études avaient déjà mis en évidence que les travailleurs intérimaires étaient davantage exposés au risque d’accident du travail que leurs collègues directement employés par l’entreprise.

Une récente étude de la Dares le confirme mais en apportant un élément nouveau d’importance : “quand ils côtoient des intérimaires, les salariés permanents ont également davantage d’accidents du travail”.
Plus précisément, “quand un établissement recourt à un volant d’intérimaires supérieur à 4 % de ses effectifs employés en propre, le taux d’accidents du travail de ces derniers est plus élevé”. Mais cette relation n’est pas
linéaire. En effet, “le taux d’accidents diminue au-delà du seuil de 10 % d’intérimaires, même s’il reste plus élevé qu’en l’absence d’intérimaires”.

Comment expliquer ces variations ? Les auteurs avancent “qu’il se peut que relativement à une situation où les intérimaires sont peu nombreux et occasionnels, l’emploi habituel d’une forte proportion d’intérimaires permette de réduire les incertitudes liées à la coactivité entre salariés de statuts différents” Même si cette hypothèse demande à être vérifiée par de plus amples investigations, il est fort possible que ces résultats s’expliquent par une meilleure prise en charge des travailleurs intérimaires dans les entreprises qui y recourent de façon importante et régulière, y compris sur le plan de la transmission des règles de sécurité. Toujours est-il que cette étude rappelle avec force la nécessité de porter la plus grande attention à l’accueil des publics à risque que constituent les travailleurs intérimaires, temporaires mais aussi les nouveaux embauchés.

(1) “Les salariés des entreprises sous-traitantes sont-ils davantage exposés aux accidents du travail ?”, Dares, 01/03/23, librement consultable sur www.dares.travail-emploi.gouv.fr

Le suivi des accidents de travail et leur recueil dans le DUERP

« Lorsqu’un accident du travail survient, la législation prescrit à l’employeur d’en effectuer l’analyse et de prendre des mesures permettant d’éviter qu’un accident de même nature se reproduise. Tout accident doit ainsi être consigné dans le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) »

Bien que la sensibilisation des dirigeants de sociétés à la nécessaire prévention des risques soit en constante progression, les accidents du travail restent aujourd’hui encore une problématique importante. (540000 accidents du travail ont été recensés, en 2020, malgré la crise sanitaire). Parmi les secteurs les plus touchés, le BTP est en tête. Lorsqu’un accident survient, le premier réflexe est de chercher un responsable et souvent, par réflexe, la faute est imputée à la victime elle-même. Or, à défaut d’une enquête plus rigoureuse, l’accident risque de se reproduire. Le bon suivi des accidents de travail est donc indispensable à la prévention des risques.

Le Code de la sécurité sociale régit la question des accidents de travail dans son Livre 4. Aux termes de l’article L.411-1 de ce code, “est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise”. Outre le Code de la sécurité sociale, le Code du travail précise à l’article R4141-8 qu’en cas d’accident du travail grave ou de maladie professionnelle ou à caractère professionnel grave, l’employeur doit procéder à l’analyse des conditions de travail. Il doit aussi organiser, si nécessaire, au bénéfice des travailleurs intéressés, des formations à la sécurité. Il en est de même en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle (ou à caractère professionnel) présentant un caractère répété :

1° Soit à un même poste de travail ou à des postes de travail similaires ;
2° Soit dans une même fonction ou des fonctions similaires. Lire la suite