4 leviers managériaux de prévention du risque routier professionnel

Agir sur le seul comportement des salariés ne saurait constituer une véritable politique de prévention du risque routier. Comme le précise l’INRS dans une brochure consacrée à ce thème (1), il convient de mettre en place de bonnes pratiques à l’échelle de l’entreprise tout entière.

1- Améliorer le management des déplacements

“La première mesure de prévention consiste d’abord à s’interroger sur la nécessité de prendre la route. Réduire de 10 % les déplacements routiers des collaborateurs réduit d’autant le risque d’accident.” Les experts suggèrent ainsi de recourir à des solutions techniques telles que les audioconférences, les visioconférences, Internet et l’intranet qui permettent de travailler à distance. Avec, à la clef de substantielles économies de temps, d’argent et d’énergie. Autre possibilité trop souvent négligée : le recours aux transports en commun ou les formules mixtes combinant l’avion ou le train avec la location de véhicules plutôt que le “tout automobile”. Enfin, lorsque le déplacement routier est inévitable, il est recommandé de les gérer avec le même soin qu’une tâche professionnelle. “Leur planification doit être compatible avec le respect du Code de la route : par exemple, en ne faisant pas peser de contraintes horaires trop lourdes sur les conducteurs, en incluant des temps de pause, ou encore en anticipant sur les difficultés de circulation.

2 – Améliorer le management du parc de véhicules

La sécurité dépend aussi grandement de l’état des véhicules. “Les véhicules doivent être maintenus en bon état de fonctionnement par l’entreprise. Un carnet d’observations doit être affecté à chaque véhicule pour garantir le suivi de la maintenance”, rappellent les experts. Ils soulignent aussi que “les équipements de sécurité et de confort permettent d’éviter des accidents ou d’en réduire la gravité : ABS, airbags conducteurs et passagers, climatisation, direction assistée, équipement d’assistance électronique à la conduite, commande de la radio au volant, limiteur de vitesse, système d’aide à la navigation, pneus neige, témoin de pression, bandes réfléchissantes, indicateur de gabarit, témoin de surcharge du véhicule…” De façon plus globale, ils insistent sur le choix de véhicules adaptés à leur usage : une berline n’est pas destinée au transport de charges, fut-il occasionnel… Lire la suite

L’intérim accroît le risque d’accident du travail

De nombreuses études avaient déjà mis en évidence que les travailleurs intérimaires étaient davantage exposés au risque d’accident du travail que leurs collègues directement employés par l’entreprise.

Une récente étude de la Dares le confirme mais en apportant un élément nouveau d’importance : “quand ils côtoient des intérimaires, les salariés permanents ont également davantage d’accidents du travail”.
Plus précisément, “quand un établissement recourt à un volant d’intérimaires supérieur à 4 % de ses effectifs employés en propre, le taux d’accidents du travail de ces derniers est plus élevé”. Mais cette relation n’est pas
linéaire. En effet, “le taux d’accidents diminue au-delà du seuil de 10 % d’intérimaires, même s’il reste plus élevé qu’en l’absence d’intérimaires”.

Comment expliquer ces variations ? Les auteurs avancent “qu’il se peut que relativement à une situation où les intérimaires sont peu nombreux et occasionnels, l’emploi habituel d’une forte proportion d’intérimaires permette de réduire les incertitudes liées à la coactivité entre salariés de statuts différents” Même si cette hypothèse demande à être vérifiée par de plus amples investigations, il est fort possible que ces résultats s’expliquent par une meilleure prise en charge des travailleurs intérimaires dans les entreprises qui y recourent de façon importante et régulière, y compris sur le plan de la transmission des règles de sécurité. Toujours est-il que cette étude rappelle avec force la nécessité de porter la plus grande attention à l’accueil des publics à risque que constituent les travailleurs intérimaires, temporaires mais aussi les nouveaux embauchés.

(1) “Les salariés des entreprises sous-traitantes sont-ils davantage exposés aux accidents du travail ?”, Dares, 01/03/23, librement consultable sur www.dares.travail-emploi.gouv.fr

Travail de nuit et amélioration des conditions de travail

“Les horaires atypiques sont rarement considérés comme un risque professionnel, mais plutôt comme un facteur de pénibilité”. Ensuite, “les effets potentiels sur la santé sont différés dans le temps et pas toujours bien connus”.

“Lors des visites en entreprises, on constate que l’évolution des risques intègre peu la thématique des horaires atypiques”, remarquent Caroline Sevino et Corinne Wolhugel, contrôleurs de sécurité à la Carsat Alsace-Moselle. Comme elles l’expliquent dans un article de la dernière livraison de la revue Hygiène &  sécurité au travail consacrée au travail de nuit, cette lacune s’explique par un faisceau de facteurs (1).

Tout d’abord, “les horaires atypiques sont rarement considérés comme un risque professionnel, mais plutôt comme un facteur de pénibilité”. Ensuite, “les effets potentiels sur la santé sont différés dans le temps et pas toujours bien connus”. Enfin, “une certaine attitude fataliste” débouchant sur “un consensus salariés/employeur sur la difficulté du travail de nuit” contrebalancé par les contreparties que chacun y trouve.

Du côté patronal, le travail de nuit permet bien sûr “une meilleure rentabilisation de l’outil de production”. Mais les salariés semblent aussi y trouver leur compte : “travailler la nuit offre notamment un avantage salarial, une autonomie plus grande, une hiérarchie moins présente et du temps libre en journée”.

Pour faire évoluer les pratiques, la solution mise en avant consiste à associer les salariés aux débats sur l’aménagement du temps de travail. Mais cette façon de faire ne vient pas à bout de toutes les difficultés car “le choix des salariés prend rarement en compte les aspects de santé et de sécurité : leurs priorités sont le temps libéré (favorisant le nombre de jours consécutifs de repos) et la conciliation vie professionnelle – vie personnelle ”. Pour surmonter cet écueil, les intervenantes de la Carsat estiment qu’il faudrait “repositionner le risque lié au travail en horaires atypiques dans l’approche classique de l’évaluation des risques professionnels (EVRP)”, matérialisée par la réalisation de l’incontournable document unique. Lire la suite

Comprendre et prévenir les risques du travail de nuit

“le travail de nuit crée une limitation de la vie sociale en raison de la discordance temporelle entre le rythme du travailleur et le rythme de l’ensemble de la société. Cela se traduit par des difficultés et des décalages dans l’organisation des temps de vie extraprofessionnels, et peut induire aussi, au sein de la famille, une limitation des temps de partage, une altération des relations et des déséquilibres dans l’organisation du foyer.

Voici quelques mois, une vaste enquête a mis en évidence que le travail de nuit avait fortement augmenté en France ces dernières décennies (1). Alors que la France comptait 3 670 000 travailleurs de nuit en 1982, elle en comptait 4 370 000 en 2015 en France. De surcroît, alors qu’en 1982, le travail de nuit habituel représentait 24 % du travail de nuit global, en 2015 sa part avait déjà presque doublé, atteignant 42 %.

Enfin, en raison de l’abandon de la législation qui, jusqu’en 2001 limitait le travail de nuit des femmes à certains secteurs, la proportion de femmes effectuant un travail de nuit habituel a augmenté de 150 % entre 1982 et 2015. Or, comme on le sait, le travail de nuit présente des risques spécifiques pour la santé qu’il convient de connaître, évaluer et bien sûr prévenir. C’est ce que permet la revue Hygiène & sécurité au travail, qui consacre son édition de mars au travail de nuit et aux moyens d’en prévenir efficacement les effets les plus néfastes pour la santé des travailleurs (2). En voici quelques points saillants.

Quels sont les risques du travail de nuit pour la santé physique ?

De nombreuses études épidémiologiques et recherches cliniques ont démontré que le travail de nuit comportait des risques pour la santé. En 2012, une étude de la Société française de médecine du travail (SFMT) et de la Haute autorité de santé (HAS) soulignait
que le travail de nuit était associé à des troubles du sommeil, entraînant une perte d’une heure de sommeil journalier en moyenne (3). Elle pointait aussi les troubles de la vigilance et le risque de somnolence entraînant une exposition accrue aux accidents du travail.
De façon plus inquiétante, la SFMT identifie également un sur-risque de cancer du sein chez les femmes et, en cas de grossesse, une augmentation des risques de fausse couche, d’accouchement prématuré et de retard de croissance intra-utérine. Ces dernières observations sont d’autant plus importantes que, ces dernières décennies, la progression du travail de nuit est particulièrement importante chez les femmes, toujours plus nombreuses à travailler dans le secteur des services.
Enfin, la même étude relève une association plus modérée du travail de nuit avec une augmentation des maladies cardiovasculaires, de l’indice de masse corporelle, de l’hypertension artérielle, des perturbations du bilan lipidique et du risque de développer un ulcère à l’estomac.

Quels sont les risques du travail de nuit pour la santé mentale ? Lire la suite

Plusieurs études confirment l’impact de la crise sanitaire sur la santé mentale des travailleurs

Confinements forcés, télétravail plus ou moins contraint, chômage partiel, décalage des horaires, diminution des contacts avec les collègues… L’épidémie de Covid-19 et des mesures sanitaires prises pour la combattre ont considérablement modifié, pendant de longs mois, les conditions de travail des actifs français.
 

 Hausse des états dépressifs

 Une synthèse, réalisée par Santé publique France à partir de différentes enquêtes, permet maintenant de mesurer l’impact de ces événements sur la santé mentale des Français. Sans surprise, elle démontre que cette période a été très mal vécue par de nombreux travailleurs.
L’enquête Coviprev réalisée par Santé publique France constate ainsi que 30,5 % des actifs occupés ont déclaré des symptômes d’anxiété au début du confinement de 2020 et qu’environ un actif sur cinq présentait des symptômes dépressifs en début des deux périodes de confinement. De même, les troubles du sommeil touchaient environ deux tiers des actifs occupés. S’agissant de la consommation d’alcool et de tabac, le bilan est plus contrasté ou plutôt “polarisé”. En effet, selon une étude pilotée par la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildecca), 30 % des personnes interrogées ont déclaré avoir augmenté leur consommation de tabac et 14 % celle d’alcool. Mais, à l’inverse, 17 % des répondants ont affirmé avoir diminué leur consommation de tabac et 18 % celle d’alcool. Ici, une distinction doit être faite selon le sexe. En effet, chez les hommes, l’augmentation de la
consommation de tabac pendant le confinement était associée à une augmentation de la charge de travail alors que pour les femmes, elle était associée à une diminution de la charge de travail habituelle. Enfin, l’enquête Coset-Covid (Santé publique France) a permis d’évaluer la prévalence de troubles anxio-dépressifs en sortie de confinement en juin 2020. Son principal constat est l’augmentation des difficultés de sommeil, en particulier pour les travailleurs indépendants et les salariés du monde agricole, et de fortes prévalences de symptomatologie d’anxiété dépressive.

(1) “Synthèse des résultats des études de l’impact de l’épidémie de COVID-19 sur la santé mentale, les addictions et les troubles du sommeil parmi les actifs occupés”, Santé Publique France (www.santepubliquefrance.fr), janvier 2023.